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TIRAILLEMENTS DANS LE BUREAU DU DOYEN DES JUGES SUR LE REPORT DE SON INCULPATION POUR LUNDI : La défense de Badara Gadiaga dit niet à son inculpation puis boude, le juge d'instruction se plie à leur demande et reporte à lundi

Rédigé par leral.net le Samedi 12 Juillet 2025 à 19:48 | | 0 commentaire(s)|

TIRAILLEMENTS DANS LE BUREAU DU DOYEN DES JUGES SUR LE REPORT DE SON INCULPATION POUR LUNDI : La défense de Badara Gadiaga dit niet à son inculpation puis boude, le juge d'instruction se plie à leur demande et reporte à lundi

 
 
À la suite de son face à face avec le procureur de la République, Badara Gadiaga a failli être inculpé puis placé sous mandat de dépôt, puisque son dossier est désormais entre les mains du Doyen des juges du tribunal de Dakar. Mais, ses avocats, qui avaient auparavant boycotté puis boudé le bureau du juge, ont réussi à faire reporter son inculpation à ce lundi. En évoquant la disposition de l'article 101 du code pénal qui dit que la personne inculpée doit se faire assister par ses avocats, entre autres, ils ont réussi à faire plier le juge.
 
 
 
 
Hier, vendredi, 11 juillet 2025, vers 11h, Badara Gadiaga a été déféré au parquet.  Le procureur de la République, dans son réquisitoire introductif, a désigné le cabinet du Doyen des juges d'instruction pour son inculpation. Mais, il y a eu beaucoup de tiraillements entre ses avocats et le juge en charge de son dossier. Et, au moment où le magistrat instructeur voulait l'inculper, ses conseils se sont opposés à cette mesure, tout en demandant le report pour 24h, c'est-à-dire lundi, 14 juillet.
 
 
Me Mouhamadou Moustapha Dieng : «Le Doyen des juges était déjà part, mais, il est retourné à son bureau pour…»
 
 
Par rapport au refus de voir leur client inculpé de manière "précipitée", Me Mouhamadou Moustapha Dieng, avocat de la défense, explique leurs raisons : "parfois, on a des dossiers où la personne incriminée fait 4 retours de parquet. Badara Gadiaga vient aujourd'hui, le procureur fait son réquisitoire avant qu'on ne remette le dossier au Doyen des juges d'instruction qui était déjà rentré. Mais, il est retourné à son bureau avant de nous dire qu'il va inculper Badara Gadiaga. Nous lui avons dit qu'on est plusieurs avocats et aussi qu'on n’était pas prêt, ni disponible. On lui a alors demandé un report mais, il a refusé. C'est là que nous sommes partis pour nous concerter".
Quelques minutes plus tard, les avocats sont retournés dans son bureau en lui proposant toujours de reporter son inculpation pour lundi afin qu'ils préparent la défense de leur client. Là encore, le juge a encore campé sur sa position. De concert, ils se sont retirés pour le laisser seul avec Badara Gadiaga. Mais avant cela, les avocats de la défense ont usé des conditions prévues par l'article 101 du code pénal qui doivent, selon eux, être respectées afin de faire plier le juge. Cet article dit que toute personne qui doit être inculpée doit être assistée par ses avocats. "Sur la base de cet article, nous avons au préalable écrit une lettre à notre client pour qu'il dise au juge qu'il avait besoin de l'assistance de ses avocats. Puisque l'article 101 dit que lorsqu'on inculpe une personne, elle peut demander la présence de ses avocats, mais s'ils ne sont pas disponibles, l'inculpation doit être reportée de 24h. Et 24h, en l'espèce, c'est lundi. Eux, de toutes les façons, avaient requis la mandat de dépôt et nous, nous ne voulions pas qu'ils le mettent en prison aujourd'hui. Il fallait qu'on sache les charges qui sont retenues contre lui et qui sont consignées dans le dossier", a confié Me Dieng.
Ce dernier de poursuivre : "le Doyen des juges voulait même nous prêter le dossier pour qu'on puisse le lire jusqu'à 22h, mais nous lui avons retorqué que nous ne travaillons pas dans la précipitation. Et collectivement, on lui a dit qu'on le laisse avec notre client. C'est après cela qu'il a négocié avec notre client à qui il a d'ailleurs demandé de nous convaincre, nous ses avocats, pour qu'on le rejoigne dans son bureau. Mais on a refusé. Finalement, le juge nous a suivis et a reporté l'inculpation pour lundi matin. Ce qui est une première manche gagnée par la défense de Badara Gadiaga. On a exigé le respect des dispositions du code de procédure pénale, de la légalité et surtout des droits de la défense qui sont sacrés. Et ça n'enlève en rien l'estime que nous avons du Doyen des juges, Abdou Aziz Diallo. Il nous a écoutés et a compris notre démarche. Il savait que la procédure allait être nulle s'il inculpait Badara Gadiaga. C'est pourquoi il l'a renvoyée pour lundi".
 
 
 
Les révélations de Me Baba Diop
 
 
Son confrère, Me Baba Diop, a quant à lui révélé que vers 15h, ils ont subitement appris que le procureur avait déjà fait son réquisitoire et qu'il avait transmis le dossier au Doyen des juges d'instruction. Le Doyen des juges d'instruction, précise-t-il, a été appelé dare-dare parce qu'il avait déjà quitté le tribunal. "Il a été appelé pour revenir et faire l'inculpation. Nous, on s'est dit qu’il ne faut pas qu'on nous prenne pour ce que nous ne sommes pas. On ne peut pas accepter cette précipitation-là dans la procédure. Nous savons que d'habitude les dossiers qui vont en instruction prennent souvent un peu de temps avant d'atterrir dans le bureau du juge. C'est ce qui explique d'ailleurs les retours de parquet", a confié Me Diop. Sur le boycott de l'inculpation de leur client, Me Diop ajoute : "on s'est dit qu’on n’acceptera pas l'inculpation et on va demander au Doyen des juges de nous laisser le temps de nous organiser pour la défense. Alors, on a précédé Badara dans le bureau du Doyen des juges. On s'est présenté et on lui a demandé gentiment de reporter son inculpation. Parce que déjà on ne s'était pas préparé, en plus il y a des confrères qui étaient absents comme Mes Oumar Youm, El Hadji Diouf et Seydou Diagne etc. On lui a dit que nous, aujourd'hui, on n’est pas en mesure de défendre ce dossier-là. On lui a fait comprendre qu'on est dans les délais et cette précipitation-là ne se justifie pas. C'est un dossier comme tout autre dossier. Alors le Doyen nous a écoutés et nous a respectueusement répondu. Il nous a rétorqué qu'il ne pouvait pas accepter cette demande et qu'il était même prêt à nous recevoir sans robe pour assister notre client et qu'il pouvait nous laisser le dossier jusqu'à 20h, mais qu'il allait faire l'inculpation ce jour-là. On lui a demandé de nous donner un bureau pour qu'on se concerte à nouveau avec notre client puisqu'il n'accédait pas à notre demande que nous avons formulée de manière courtoise et polie. On est parti se consulter et finalement on a pris la décision de ne pas accepter cette inculpation. Et à partir de ce moment, nous avons décidé d'user de ce que la loi nous donne. On s'est basé sur les dispositions de l'article 101 du code de procédure pénale qui dit très clairement que l'inculpé peut demander au juge d'instruction le report de son inculpation pour être assisté par ses avocats. Parce que à partir de ce moment, on a décidé de quitter le bureau du Doyen et de dresser une lettre pour le compte de notre client sur la base de l'article 101 et c'est cette lettre qui devait être remise au Doyen des juges. Et c'était à Badara Gadiaga, qui devait dire au Doyen qu'il ne répondrait pas à ses questions tant que ses avocats ne sont pas là. À partir de ce moment, le doyen était bloqué. Il n'y avait aucun avocat et l'inculpé, sur la base de l'article 101, a demandé à être assisté par ses avocats sinon il ne répondrait à aucune question. Finalement, le Doyen a été obligé de remettre ça jusqu'à lundi".
Le conseil a tenu à rappeler que si le juge avait inculpé Badara Gadiaga sans ses avocats, cela risquait de compromettre la procédure, si l'on se base sur l'article 101 du code de procédure pénale, parce que ça serait une irrégularité de procédure. D'après lui toujours, cela pourrait peut-être conduire à l'annulation de la procédure. Ce qui lui fait dire que c'est un risque que le Doyen ne pouvait pas courir, surtout qu’un autre retour de parquet ne causerait aucun problème.
Par rapport aux nouvelles charges retenues contre Badara Gadiaga, le conseil a confié l'histoire du supposé financement de personnes à l'extérieur, qui aurait trait avec ses sociétés. "On a essayé de l'interroger sur ses sociétés. Mais le problème, c'est que Badara n'a pas de société. Donc, ils se sont trompés. Ils ont vu des transactions qui ont été faites à partir d'une plate-forme qu'on appelle SGIE. Ils ont pensé que l'argent a été envoyé à cette société et que cette société appartient à Badara. C'est pourquoi ils ont visé cette infraction de financement en disant qu'il se fait financer à l'extérieur pour discréditer les institutions. C'est ce qui a fait que les gens parlent de nouvelle incrimination, mais depuis l'enquête, ils avaient déjà cette information. C'est pourquoi le procureur a ajouté cette infraction. Pour avoir plus d'informations sur ça, il faudrait une délégation judiciaire". Toutefois, pour le moment, Me Baba Diop a déclaré que les incriminations retenues contre Badara Gadiaga sont l'offense à une personne exerçant des charges ou prérogatives de chef de l'Etat, diffusion de fausses nouvelles et l'infraction sur le financement extérieur. "Tout cela n'est pas officiel parce qu'il faudra attendre que le Doyen des juges l'inculpe. Mais dans le réquisitoire du procureur, c'est ça. Maintenant, on attend de voir ce que le Doyen va retenir en définitive comme charges et puis nous aussi, on verra ce qu'on va demander comme une mesure alternative au mandat de dépôt, parce qu'il a été requis", a-t-il détaillé.
Toutefois, Me Diop a fait une précision de taille en ce qui concerne le mandat de dépôt requis par le procureur ainsi que les articles qu'il a visés et qui feront que le juge d'instruction va inéluctablement le placer sous mandat de dépôt. "Le parquet a requis des articles qui lient le juge, notamment l'article 255 du code pénal et l'article 132 du code de procédure pénale. Il y a aussi l'article 80 alinéa 2, les articles 254, 255, 257 du CP, et 139 du code de procédure pénale. Mais rien que l'article 255 du code pénal et l'article 139 du code de procédure pénale vont lier le juge par rapport au mandat de dépôt. L'article 255 est relatif à la diffusion de fausses nouvelles et l'article 139 dit que lorsque vous êtes poursuivi pour ces genres d'infractions-là, le juge d'instruction est obligé de mettre sous mandat de dépôt si le parquet le demande".
 
Fatou D. DIONE
 
 



Source : https://www.jotaay.net/TIRAILLEMENTS-DANS-LE-BUREA...