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Gilets jaunes : Macron veut désamorcer la bombe

Rédigé par leral.net le Mercredi 5 Décembre 2018 à 10:21 | | 0 commentaire(s)|

S’il laisse Edouard Philippe en première ligne, le chef de l’Etat consulte tous azimuts. Et il fera des propositions avant samedi.
 
« Il va parler ! Il faut qu’il désamorce la bombe  avant samedi en annonçant un moratoire sur la hausse des taxes sur les carburants », assure un très proche du président, alors que cette piste tient fortement la corde. Muré dans le silence depuis son retour d’Argentine dimanche, le chef de l’Etat a mené en coulisses ses propres consultations en marge de celles, officielles et médiatisées, de Matignon.
 
Arrimé à son portable jusqu’à des heures tardives ce week-end et encore lundi, il a échangé avec ses proches et « textoteurs du soir », ces visiteurs du soir du « nouveau monde ». Face à la colère du pays, tous l’ont sommé de s’exprimer au plus vite, sans attendre, face à une situation qui se tend d’heure en heure, qu’ils qualifient de « rage », de « fureur » et, pour les plus francs, de « crise pré-insurrectionnelle ». Lundi soir, loin des caméras, le président a réuni une partie du gouvernement  avec le Premier ministre à l’Elysée, dont Christophe Castaner, Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, François de Rugy, Agnès Buzyn, Muriel Pénicaud ou Jacqueline Gourault. Il a aussi annulé sa visite cette semaine en Serbie.
 
Mais il met un point d’honneur à ne pas réagir lui-même à chaud. À tous ses interlocuteurs, il répond qu’il veut « prendre son temps » et ne pas parler pour ne rien dire. « Il veut prendre un peu de recul et de hauteur », défend l’un de ses soutiens, qui juge qu’une intervention trop rapide serait parasitée par l’enjeu sécuritaire après les violences de samedi, et écraserait la réponse de fond aux Gilets jaunes sur la fracture sociale. Le président serait, du reste, lucide sur le fait qu’il a manqué son intervention mardi dernier. « Il s’est planté, et il le sait », assène un proche. « Parler, c’est un fusil à un coup, il ne peut pas se rater encore », abonde un autre.
 
«Le Premier ministre est usé, mort !»
 
Pour répondre à cette crise qui fait trembler la République, le chef de l’Etat entend utiliser à plein les institutions. À commencer par son Premier ministre, chargé de consulter les chefs de partis et de groupes. À tous ceux qui le prient de monter en première ligne, il répond: « J’ai demandé à Edouard Philippe de le faire ». Souvent accusé de trop s’exposer, Macron veut utiliser son fusible. Mais la réponse ne convainc pas, même ses plus proches. « Le Premier ministre est usé, mort ! », s’agace l’un, partisan d’un remaniement avant les européennes.
 
« Macron a été élu contre les partis et son seul message depuis samedi, c’est de réunir les mêmes partis ? », objecte un autre, furieux. Le président, aux dires de certains de ses partisans, serait conscient d’être trop seul. « Personne ne va le défendre sur les plateaux à part un secrétaire d’Etat de 29 ans (NDLR: Gabriel Attal dimanche soir sur France 2) ! », s’offusque un de ses interlocuteurs. « Je suis tout seul devant », s’est emporté Macron récemment.
 
Pour l’heure, il se contente d’une communication sans le son. Des images, comme celles, diffusées lundi, de son déjeuner avec des CRS dans une caserne du XXe arrondissement de Paris. Le président a annulé in extremis son déjeuner prévu avec des chefs étoilés pour partager le plateau-repas de compagnies des forces de l’ordre venues de toute la France (Poitiers, Mulhouse ou Bordeaux) pour protéger Paris en ce samedi 1er décembre.
 
«Cela aurait suffi si on l’avait fait plus tôt, mais là...»
 
Côté mesures, il entend les préconisations de ses proches, qui lui conseillent de façon pressante de revenir sur la hausse des taxes sur les carburants ou d’instaurer une taxe temporaire sur les plus hauts revenus ou les transactions financières. « C’est sûr qu’il fera des propositions avant samedi. Il faut quelque chose de très fort qui renverse la table », plaide l’ancienne icône de Mai-68 Daniel Cohn-Bendit, très proche du président. « Je pense qu’on va aller vers un moratoire sur les taxes sur le carburant. Mais ça ne suffira pas. Cela aurait suffi si on l’avait fait plus tôt, mais là... », s’inquiète toutefois un conseiller de l’exécutif.
 
En froid avec le chef de l’Etat, l’un de ses anciens soutiens frémit en songeant à la suite: « On est dans la première phase de 1789, quand Louis XVI ne comprenait pas ce qu’il se passait et que ses conseillers lui disaient : Sire, ce n’est pas une révolte, c’est une révolution ».
 
Source LeParisien