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Moustapha Niasse (Secrétaire général de l'Afp) : ‘Le cadeau fait à Segura n’a rien d’africain’

Dans cette deuxième et dernière partie de l’entretien qu’il nous a accordé, l’ancien Premier ministre du Sénégal revient sur les aspects économiques de l’actualité : la privatisation rampante de la Senelec, la destruction de la filière arachidière, la dette intérieure, etc. Auparavant, il a donné son appréciation sur le cadeau fait à Alex Segura.


Rédigé par leral.net le Mardi 24 Novembre 2009 à 13:29 | | 1 commentaire(s)|

Moustapha Niasse (Secrétaire général de l'Afp) : ‘Le cadeau fait à Segura n’a rien d’africain’
Wal fadjri : L’actualité récente a été marquée par ce qu’il est convenu d’appeler ‘affaire Segura’. Comprenez-vous le cadeau dit africain remis par le président de la République à l'ex-représentant du Fmi au Sénégal, Alex Ségura ?
Moustapha NIASSE : Mais ce cadeau n'a rien d'africain. Ils (les tenants du pouvoir, Ndlr) ont dit que c'est une tradition sénégalaise, mais c'est parce qu'ils étaient à la recherche de prétexte pour justifier cette affaire qui a été un esclandre, une gifle sur la joue des Sénégalais, à commencer par le premier d'entre eux, c'est-à-dire le président Abdoulaye Wade lui-même. Quand on fait ce genre de cadeau au Sénégal, on offre une figurine, une statuette, une tapisserie, un tableau. On ne met pas dans une mallette 100 mille euros et 50 mille dollars. Je pense sincèrement que ceci avait été concocté pour gêner quelque part M. Segura lorsqu’il devrait se trouver, une fois de retour à la position centrale à Washington, que chaque fois que serait évoqué devant lui, la possibilité d'une évaluation de la manière dont les finances et l’économie sénégalaises sont gouvernées par le président de la République lui-même. C'était en quelque sorte un moyen d’acheter à l'avance un silence supposé qui porterait, si cela était observé, un service par simplement l'occultation d'un certain nombre de données que M. Alex Ségura pourrait avancer à l'occasion d'une réunion de synthèse, d'une rencontre de coordination ou si on lui demandait de faire un rapport final de mission. Et c'est le Sénégal tout entier qui paie les pots cassés à la suite de cette erreur grossière. Mais ce n'est pas seulement le Sénégal, c'est l'Afrique tout entière qui a été décrédibilisée, discréditée à la suite de cette affaire Segura.

Wal fadjri : Cette affaire Segura et la mallette d'argent qui a été volée ici à la résidence de l'Ambassadeur du Sénégal à Paris témoignent d’une certaine circulation d'argent liquide dans le palais de la République. Vous qui avez pratiqué le président Senghor en ayant été son ancien directeur de cabinet et le président Abdou Diouf dont vous avez été le ministre des Affaires étrangères notamment, est-ce qu’il y avait ce genre d’argent en circulation à la Présidence de la République ?

Moustapha NIASSE : Jamais ! (Il se répète). Jamais il n'y a eu ce genre de comportements et de pratiques quand Abdou Diouf était président de la République et avant lui quand Senghor était président de la République. Est-ce que vous avez entendu parler de perte de mallette d'argent sous Abdou Diouf ou sous Senghor ? Est-ce que vous avez entendu un scandale comme celui qu'a occasionné l'affaire Segura à l'époque d'Abdou Diouf ou de Senghor ? Il pouvait arriver que, sur les fonds de souveraineté que l'on appelle les fonds politiques, des gestes aient été posés pour la sécurité de l'Etat sénégalais, pour la promotion de l'Etat sénégalais sans que ce soit des gestes de corruption ou pour acheter le silence de qui que ce soit. D'ailleurs, j'ai lu quelque part que les Premiers ministres ont des fonds politiques. Je profite de l'occasion pour indiquer, en prenant à témoin le président Wade et son gouvernement, que quand moi, j'étais son Premier ministre pendant les onze mois, il n'existait pas de fonds politiques à la primature. Je crois que je dois souligner ça pour qu’on évite tout amalgame. Jamais il n'y a eu de fonds politiques à la Primature, quand moi, du 1er avril 2000 au 3 mars 2001, j'étais Premier ministre. On parle trop d'argent sous le régime d'Abdoulaye Wade et tous les ans ! Mais pourquoi ? La question reste posée et elle est sans réponse pour le moment. Mais un jour, je crois que les éléments de réponse vont apparaître. C’est scandaleux.

‘C'était en quelque sorte un moyen d’acheter à l'avance un silence supposé qui porterait, si cela était observé, un service par simplement l'occultation d'un certain nombre de données que M. Alex Ségura pourrait avancer’

Le ministre de l'Economie, Abdoulaye Diop, a reconnu devant l'Assemblée nationale que le Sénégal ne pourra pas payer pour l'instant sa dette intérieure… Le ministre de l'Economie et des Finances du Sénégal est un homme honnête. Tout le monde le reconnaît. Je crois que sa religiosité - cela aurait été la même chose s'il était chrétien - a cet impact que lorsqu'il faut dire certaines vérités, il n'hésite pas à les exprimer. Et le fait qu'il ait dit devant l'Assemblée nationale que le Sénégal n'a pas la possibilité de faire face à son endettement, mais qu'il faut attendre des éclaircies nouvelles pour cela, il faut croire qu'il dit la vérité. Et moi j'y crois. Et je sais qu'il dit la vérité. Le résultat de tout cela provient de quoi ? Est-ce que l'on sait aujourd’hui de manière claire le montant des sommes que le Chef de l'État dépense chaque année pour assurer ses déplacements à l'étranger qui sont fort nombreux, les dépenses extra-budgétaires dont tout le monde sait qu'elles sont à un niveau extrêmement élevé pour couvrir ses voyages, pour couvrir certains de ses rêves, pour aller chercher des prix, lesquels prix n'ont aucun impact sur le développement du pays, ou des diplômes Honoris Causa dans des universités, etc. Et puis tout le monde sait que le train de vie de l'État est élevé à un point tel que, aujourd'hui, le trésor public ne suffit plus pour le supporter. Tous ceux-ci sont des actes de mal-gouvernance qui sont quotidiennement posés et il n'y a aucun contrôle accepté par le pouvoir en place pour essayer de réguler, de réduire et de maîtriser ce type de dépenses extra-budgétaires en termes de dépassement par rapport aux prévisions qui figurent dans la loi de finance.

Wal fadjri : Mais les entreprises croulent sous le poids de crise financière, notamment à cause de cette dette intérieure que l'État a du mal à payer. Vous avez été Premier ministre, comment, selon vous, les autorités sénégalaises pourraient payer ces entreprises pour qu'elles puissent continuer à apporter de la valeur ajoutée dans l'économie sénégalaise ?

Moustapha NIASSE : (…) Il faut faire voter une loi de finance exceptionnelle entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010. Dans cette loi de finance, il faut affecter des crédits au niveau des nécessités en volume pour libérer l'État de la dette intérieure sans être obligé d'aller chercher des ressources nouvelles dans l'espace de la fiscalité directe ou indirecte, demander au président de la République de réduire le train de vie de la Présidence de la République, et lui demander jusqu'à quel niveau il pourrait accepter le sacrifice de réduire son train de vie pour réaliser sur ces 300 ou 400 milliards une économie de 100 à 150 milliards, et imposer le même sacrifice à la Primature, à l'Assemblée nationale, aux ministères du gouvernement sénégalais. Au prix de cet effort-là, la dette intérieure, tout au moins ce qui en reste, peut être totalement soldée sans difficultés d'ici la fin du mois de juin 2010. Mais évidemment, si le chef de l'État continue de vivre comme il le fait, de voyager autant qu'il le fait, de dépenser à droite, à gauche comme il le fait, si les ministères continuent cet exercice de gaspillage sans limites des ressources publiques, si les autres institutions de la République – je mets de côté la Justice – se permettent de vivre comme si nous étions dans un Etat pétrolier du Golfe, évidemment, la dette intérieure restera impayée et cela va continuer d'aggraver la stagnation économique parce que les entreprises concernées qui ont contracté des emprunts au niveau des banques et continuent de payer en conséquence des intérêts de retard et des pénalités diverses, tout ceci va faire que l'économie va continuer à être à l'arrêt. Est-ce que le chef de l'État est conscient de ces dangers-là ? Je n'en suis pas sûr. Est-ce qu'il est capable de faire ces sacrifices-là ? Je n'en suis pas sûr du tout puisqu'il continue, on le voit, de faire vivre l'Etat à un niveau de dépenses qui dépasse même celui des pays industrialisés du Nord.

Wal fadjri : Il y a aussi un autre facteur qui plombe l'économie du pays : ce sont les coupures d’électricité. Récemment, le ministre de l'Energie a proposé de diviser en trois groupes la société d'exploitation de l'électricité. Pensez-vous que c'est la solution ? *

Moustapha NIASSE : Vous savez, les lois de la nature sont intangibles et immuables. Découper un problème en trois sous-problèmes n'a jamais été un moyen pour trouver une solution à une situation difficile. La Senelec doit redevenir une société privée qui fonde son action dans le souci de répondre à une demande publique et sociale et en matière de disponibilité de ressources énergétiques nécessaires au développement du pays. Une entreprise publique qui produit des services, qui vend ses services à un prix qui ne soit pas prohibitif par rapport au coût normal de ses services et qui ne dépasse pas les capacités d'accès des populations à ces services-là. Et en échange de quoi, la Senelec, entreprise privée, doit pouvoir réaliser un équilibre entre les coûts d'exploitation de son fonctionnement chaque année et les revenus qu'elle en tire avec une marge bénéficiaire qui lui permette de maintenir ses équipements, de les renouveler et de garantir la disponibilité et la sécurité de la distribution de l'électricité sur le territoire sénégalais. Voilà ce que doit être la Senelec. Cela veut dire que le ministre de l'Energie, qui qu'il puisse être, doit enlever sa main, comme on dit chez nous, du fonctionnement de la Senelec. Il faut laisser le fonctionnement de la Senelec à un directeur général, qui est nommé par un Conseil d'administration sur le choix des autorités publiques, et à son équipe. Et que l'obligation de résultats qui leur sera assignée soit de faire en sorte que l'électricité soit disponible sans délestages, sans coupures, à un prix qui soit accessible et que ce prix soit fixé à partir des termes logiques intégrant le coût d'exploitation, la prise en charge du personnel, la prise en charge de certains remboursements sous forme d'engagements et la nécessité du renouvellement des équipements techniques de production et de transport de l'énergie.

Le ministre de l'Energie doit laisser la Senelec fonctionner à partir des décisions prises par son conseil d'administration exécutées par son directeur général et son personnel.

Donc tous ces actes vains que l'on pose et qui finissent toujours par l'annonce d'un endettement en centaines de milliards, cela ne fait que plonger la Senelec au plus profond de la déchéance progressive, planifiée au point que, lorsque ces gens quitteront le pouvoir, le pouvoir, qui va arriver, va devoir mettre un effort surhumain, herculéen, pour réhabiliter des zones, comme la zone de production de l'énergie au Sénégal. Or, l'énergie joue un rôle central dans le développement économique et social d'un pays.

(…) Si un tel secteur pose tant de problèmes au Sénégal, cela veut dire que notre développement économique et social est plombé déjà par la première marche de la structure de la démarche qui doit conduire, étape après étape, à faire sortir le Sénégal de l'enlisement. On a parlé des quelques kilomètres qui ont été réalisés à Dakar. Ce secteur ne marche pas, le secteur de l'énergie ne marche pas, évidemment le secteur de la crédibilité des investissements ne marche pas non plus parce que, justement, il y a la corruption, le gaspillage, les détournements de fonds, y compris le détournement des fonds de la coopération. Ceci est très grave ! Ceci ne se passe pas seulement au Sénégal. Mais, il est très grave parce que nous parlons de notre pays, de ce qui se passe et continue de se passer chez nous.

Wal fadjri : Peut-être que le ministre de l'Energie veut copier le schéma de la Sonees

Moustapha NIASSE : Cet exemple est bon ; il est positif encore qu'il eut été très utile que la réforme qui a été mise en place pour gérer la ressource eau au Sénégal, que cet exemple puisse être transféré au niveau du secteur de l'énergie et au niveau des autres secteurs. Mais ceci n'est pas une panacée puisque l’objectif, c’est qu’il fallait, un jour, que la société non sénégalaise qui a racheté une partie de la gestion de l'eau puisse être dans toute la mesure du possible transformée en société de coopération entre des Sénégalais et les actionnaires actuels qui ont racheté une partie du secteur eau. C'est important ça. Si la Senelec devait être privatisée, avec la création non pas de trois sociétés, mais de seulement deux : une société de gestion, comme le cas de la Sonees et une société de patrimoine, ce serait valable à la condition que cela ne commence pas par un endettement de plusieurs dizaines de milliards. Au moment où l'on annonce la réforme que devra connaître – si cela aboutit – la Senelec en trois entités dont l'existence n'est pas justifiée ni mathématiquement ni rationnellement, il aurait suffi de créer une société de gestion et une société de patrimoine. Mais, ceci doit être discuté avec l'Assemblée nationale, avec le Sénat et avec les partenaires c'est-à-dire le personnel de la Senelec et les consommateurs d'énergie au Sénégal, c'est-à-dire la société civile. Si cela était fait de cette manière-là, il n'y aurait rien à dire là-dessus. Mais il y a eu une annonce simplement que la Senelec va connaître une réforme. Certainement, l'Assemblée nationale, telle que nous l'avons actuellement, et le Sénat, tel que nous l'avons actuellement, vont, l'un et l'autre, adopter la loi qui permettra d'aller vers cette réforme-là qui est cousue de fil blanc parce qu'elle est couverte de mystères et elle porte des inconnues extrêmement graves qui, dans cinq ans, dix ans, vont produire des surprises. Mais, il sera trop tard pour rattraper, malheureusement, les occasions perdues pour distribuer aux Sénégalais de l'électricité pas chère, accessible aux populations avec une entreprise productrice de développement.

Wal fadjri : Depuis quelque temps, la Senelec connaît des problèmes. Mais les populations ne savent pas exactement si ces problèmes sont liés au vieillissement des équipements, à la surface financière de la société ou au problème d'approvisionnement en combustibles ou si c'est tout ça à la fois…

Moustapha NIASSE : Voilà les problèmes de la Senelec brièvement résumés. Cette société dispose des infrastructures qui sont opérationnelles. Une partie de ces infrastructures peut remonter, quant à la construction, à 30 ou 40 années. Mais, une partie a été rénovée et de nouveaux équipements ont été acquis pour plusieurs centaines de milliards. On parle de 500 à 600 milliards depuis une quinzaine d'années, et plus particulièrement depuis que Me Wade est arrivé au pouvoir. Mais, en matière d'équipements, des compagnies comme la Senelec qui doivent être des compagnies qui surfent sur la modernité industrielle, il y a des équipements techniques pour produire l'énergie transportée. Mais il y a également les consommables nécessaires au fonctionnement quotidien d'une entreprise, industrielle ou pas (…). Si l'on privilégie, en termes de répartition de l'investissement le secteur consommable au détriment du secteur des équipements techniques, évidemment il y a vieillissement de l'équipement parce que les produits consommables débouchent souvent sur des actes qui sont répréhensibles par rapport aux lois de la bonne gouvernance plus facilement que les équipements techniques pour produire l'énergie, la transporter jusqu'aux consommateurs. Il y a là un premier problème. Le second problème, c'est que tous les mois, ce que coûtent à la Senelec la production et la distribution de l'énergie, se situe entre 8,5 et 9,5 milliards de francs Cfa (…) pour pouvoir répondre partiellement à la demande de la clientèle. En retour, tous les mois, la Senelec perçoit en recettes entre 13,5 et 15 milliards de francs Cfa. Il y a donc une différence positive d'au moins 5 milliards tous les mois si bien que si la Senelec était gérée de manière transparente, fiable, sous contrôle selon les procédés les plus modernes de la bonne gouvernance privée, elle n'aurait pas de problèmes parce qu'elle n'aurait à payer que partiellement, selon des calendriers négociés avec les partenaires au développement et les créanciers, le remboursement de son endettement. Mais c'est que, indépendamment du fait que la Senelec se trouve dans cette situation de bénéficiaire tous les mois, cela coûte tout de même entre 5 et 6 milliards de francs Cfa en termes de coût par rapport à l'exploitation, aux revenus engrangés. C'est qu'il y a du gaspillage.

‘Si la Senelec était gérée de manière transparente, fiable, sous contrôle selon les procédés les plus modernes de la bonne gouvernance privée, elle n'aurait pas de problèmes’

Wal fadjri : En clair, est-ce que c'est la mauvaise gestion qui est à l'origine des problèmes de la Senelec

Moustapha NIASSE : Ce sont, fondamentalement, les emprunts qui sont faits sans contrôle de la part de l'Etat. C'est le rôle de l'État de contrôler les engagements financiers que prennent les entreprises à vocation publique, même si leur statut est privé. L'Etat doit veiller à ce que les principes de bonne gouvernance lui permettent d'accéder à l'information et donner un avis ou son accord avant que l'on engage une société même privée à vocation publique dans des emprunts qui, de toute manière, lors des négociations, laissent des retombées. C'est important cela. Il y a cette distanciation entre l'application des règles strictes de bonne gouvernance et le laxisme qui permet à une société d'aller négocier des emprunts dans des conditions que presque tout le monde ignore et de venir annoncer : ‘Nous avons obtenu un fonds privé de 500 milliards que nous avons empruntés sur le marché international’. Oui, mais à quelles conditions ? Et pour quelle utilisation ? Et les décaissements, selon quel échéancier, seront-ils faits ? Est-ce qu'on a vérifié que les outils, les équipements qu'on a commandés ont été payés au prix normal ? Rien de cela ne se fait. Vous citiez tantôt le type de gestion de l'eau au Sénégal. Mais c'est une très bonne gestion et il faut s'y référer et appliquer à la Senelec les mêmes règles appliquées dans la gestion de l'eau au Sénégal.

Wal fadjri : L'un des éléments importants de l'économie, c'est l'agriculture, notamment la culture de l'arachide. On sait que depuis quelques années, le président Wade veut que l'on abandonne cette culture. Mais récemment, on vient de fixer le prix au kilogramme à 165 francs Cfa. Cela est-il suffisant pour amortir le niveau de vie des populations dans l'ancien et le nouveau bassin arachidier principalement ?

Moustapha NIASSE : Le chef de l'État sait mieux que quiconque que les 165 000 francs fixés pour payer la tonne d'arachide sont loin de répondre aux règles les plus élémentaires de l’évolution de l'économie moderne. La fixation du prix d'un produit agricole se fonde sur un certain nombre d'éléments dont le premier est la correspondance aussi exacte que possible entre le prix au producteur dans une année par rapport au pouvoir d'achat qu'offrait ce produit-là par rapport aux produits commercialisés dans la même année. Autrement dit, si vous prenez l'année 1999, vous faites référence sur le coût du sac de 100 kilos de riz, en terme monétaire et vous appliquez ce résultat financier à la quantité d'arachide qu'il fallait pour avoir ce sac de riz à partir de l'année 1999. Et vous rapportez le prix des 100 kilos de riz dix ans après par rapport au prix de la quantité d'arachide qu'il faut pour acquérir le même sac de 100 kilos de riz. Et vous faites une correspondance équilibrée. S'il fallait 300 kilos d'arachide en 1999 pour acquérir les 100 kilos de riz, comment faire en sorte que les 300 kilos d'arachide du paysan puissent acquérir un sac de 100 kilogrammes de riz. C'est le calcul qui doit être fait. Maintenant, le second facteur, c'est qu'une fois ce calcul fait et que l'on sait s'il fallait 300 kilos d'arachide pour acheter 100 kilos de riz en 1999, il faudrait éviter qu'il faille, en 1999, 600 kilos d'arachide pour acheter 100 kilos de riz. C'est pourquoi, le fait de maintenir à 165 000 francs la tonne d'arachide est une fausse donnée qui dévalorise le paysan, qui dévalorise le produit de son travail et qui le fait souffrir parce que c'est une injustice car il lui faut mettre deux fois plus de poids pour acquérir le même poids de riz qu'il y a dix ans. Donc c'est injuste. D'ailleurs, vous avez bien fait de rappeler la volonté affichée du président Wade, depuis 2000, de tuer la filière arachidière qui est en train de s'exécuter progressivement. Je rappelle, qu'au mois d'octobre 2000 – le 21 octobre je crois – dans une lettre qu'il avait adressée à la Banque mondiale et qui avait été publiée sur Internet, le président s'était engagé à éradiquer la culture de l'arachide au Sénégal et ça nous l'avons dit à plusieurs reprises. Il est en train d'exécuter cet engagement-là. Mais il ne pourra pas tuer la culture de l'arachide parce que les populations continuent à s'entêter - à juste raison - à cultiver l'arachide parce qu'on ne leur a rien proposé, malgré la distribution de semences insuffisantes en quantité et contestables en qualité. Malgré cela, les paysans gardent des semences pour les années à venir et produisent bon an mal an, grâce à la pluie que Dieu fait tomber entre 400 à 800 000 tonnes. Et cette année, on pense qu'il y aura au moins 800 000 tonnes d'arachide. Mais, achetées à 165 francs le kilogramme alors que le prix du riz a été augmenté dix fois depuis 10 ans. Idem pour le prix de l'huile, idem pour le prix du sucre. Depuis hier (l'entretien a été réalisé mercredi 18 novembre 2009, Ndlr), le prix du sucre a été augmenté de 150 francs, le sucre qui était déjà cher.

Wal fadjri : La Compagnie sucrière sénégalaise a démenti cette augmentation et parle de rumeurs non fondées.

Moustapha NIASSE : J'ai vu le démenti sur Internet. Mais d'où vient l'information ? Pourquoi a-t-on annoncé que le prix du sucre est augmenté de 150 francs ? La presse a-t-elle publié des rumeurs ? Déjà que l'on contestait le prix actuel du sucre, comment peut-on annoncer que le prix du sucre est augmenté de 150 francs. Je serai heureux que ce démenti soit vrai. (…).

‘Au mois d'octobre 2000 – le 21 octobre je crois – dans une lettre qu'il avait adressée à la Banque mondiale et qui avait été publiée sur Internet, le président s'était engagé à éradiquer la culture de l'arachide au Sénégal’

Peut-être que c'est mesurant ce coût élevé de la vie des populations que le président de la République a décidé de baisser certains denrées de première nécessité.

Moustapha NIASSE : Mais, il n'a fait qu'annoncer ça ! Nous voulons des actes concrets, précis qui traduisent concrètement sa volonté de baisser les produits de première nécessité. C'est tout à fait possible. Mais de grâce que cela ne s'arrête pas aux proclamations d'intention. (…) (FIN)

Propos recueillis à Paris par Moustapha BARRY

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1.Posté par chaka zulu le 24/11/2009 13:59 | Alerter
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