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Sa mort politique décrétée par Wade, Macky Sall refuse de mourir

Longtemps en rupture de banc avec son parti, le Parti démocratique sénégalais, Macky Sall est démis de son poste de numéro 2 du Pds et de sa fonction de président de l’Assemblée nationale, sans grande résistance. Longtemps en rupture de banc avec son parti, le Parti démocratique sénégalais, Macky Sall est démis de son poste de numéro 2 du Pds et de sa fonction de président de l’Assemblée nationale, sans grande résistance. Ce dernier acte qui sonnait sa mort politique pour ses détracteurs au Pds, sort Macky Sall de son long mutisme pour démissionner du parti, de ses postes de Député et de Maire de Fatick.


Rédigé par leral.net le Vendredi 19 Décembre 2008 à 12:22 | | 0 commentaire(s)|

Sa mort politique décrétée par Wade, Macky Sall refuse de mourir
La fermeture de cette page dans sa carrière politique laissait ouvrir une autre. Le lundi 1er décembre 2008, Macky Sall pose un acte historique en créant l’Alliance pour la République-Yaakaar. La création de l’Alliance pour la République-Yaakaar suscite à notre niveau une réflexion multidimensionnelle.
D’abord, cet acte posé par l’ancien Premier ministre Macky Sall ne constitue pas, en réalité, une nouveauté dans le landerneau politique sénégalais, notamment dans l’histoire du Parti démocratique sénégalais. Au milieu des années 80, Serigne Diop a quitté le Pds pour mettre sur pied sa propre formation politique dénommée le Parti démocratique sénégalais/Rénovation (Pds/R). Au tournant des années 90, Ousmane Ngom et Jean Paul Dias suivent les pas de Serigne Diop pour fonder respectivement le Parti libéral sénégalais (Pls) et le Bloc des centristes gaïndés (Bcg). Le dernier exemple en date est la création du parti Rewmi par Idrissa Seck après avoir été exclu du Pds qu’il dit être sa famille naturelle.
Le dénominateur commun de tous ces leaders politiques est qu’ils ont eu à occuper à l’exception de Jean Paul Dias, le poste de numéro 2 au Pds. Outre cela, on constate que tous les fils spirituels de Abdoulaye Wade finissent tous par descendre de leur piédestal. Certains le sont après avoir rejoint la famille libérale à l’instar de Serigne Diop et de Ousmane Ngom, d’autres après avoir quitté la maison du père, semblent toujours, avoir le mal de la «famille» à l’image de Idrissa Seck et de Jean Paul Dias. La preuve, ces derniers adoptent une position mitigée sur l’échiquier politique national. Ils ne sont ni de l’opposition ni de la majorité présidentielle. Cet état de fait semble donner raison à Abdoulaye Wade qui, à chaque fois qu’il est en conflit avec un de ses protégés soutient qu’il est son «créateur». Sous le bénéfice de cette considération, la question qui s’impose est de savoir si Macky Sall réussira à ne pas faire bégayer l’histoire. Demain n’est pas loin.
La seconde lecture que la création de l’Alliance pour la République-Yaakaar nous inspire est que l’histoire politique du Sénégal nous révèle à suffisance que ceux qui quittent le parti au pouvoir pour mettre sur pied leur propre formation politique sont dépositaires, au début, d’un important capital sympathie. Cependant, le constat qui s’offre, toujours, à nous c’est u’ils peinent à maintenir ce capital sympathie. Comme pour dire que l’expression wolof : Ya bess ya xew est bien une réalité dans le champ politique sénégalais. Les exemples de Djibo Leïty Kâ et de Moustapha Niasse en sont de belles illustrations. L’ancien baron du Parti socialiste, le leader de l’Union pour le renouveau démocratique, a brouillé toutes les cartes à l’occasion des élections législatives du 24 mai 1998. Djibo Leïty Kâ émerge comme le troisième homme fort de la classe politique sénégalaise en obtenant 13, 22% des suffrages soit 11 sièges. Cependant, il réalise une chute considérable lors des élections législatives du 29 avril 2001 en obtenant 3 sièges. Les effets de son jeu de yoyo politique, pour reprendre Yoro Dia, entre les deux tours de la présidentielle de 2000 sont certainement passé par là, nous diriez-vous. Moustapha Niasse, quant à lui, avait réalisé un bon score (16,7 %) lors du premier tour de la présidentielle de 2000 c’est-à-dire un an après sa démission du Parti socialiste. En revanche, le leader de l’Alliance des forces du progrès a réalisé un score de 5,93% à l’occasion de la dernière élection présidentielle de 2007 autrement dit moins de 10,77% du score obtenu en 2000.
Ceci dit, il ne serait pas surprenant de voir l’Alliance pour la République-Yaakaar de Macky Sall réaliser un bon score à l’occasion des prochaines élections locales. Mais la question est de savoir est-ce qu’il saura maintenir et élargir ce capital sympathie. Tous les leaders ayant emprunté ce chemin n’ont pas eu le génie de transformer ce capital sympathie articulé, en bien des égards, autour du ndeysaan (la pitié), de la nouveauté et du nouvel espoir en un capital de militants.
Enfin, la création de l’Alliance Pour la République-Yakaar a le mérite de poser le débat sur le nombre de partis politiques au Sénégal. Le Sénégal peut aujourd’hui se vanter d’être l’un des chantres du pluralisme politique en Afrique même s’il était un multipartisme limité. En effet, le Président Léopold Sédar Senghor a institué l’ouverture démocratique le 19 mars 1975 avec la loi 76-01. Mais c’est avec l’accession de Abdou Diouf à la magistrature suprême que le pluralisme politique est devenu intégral au Sénégal en 1981. Cette ouverture démocratique a permis un développement considérable à la limite incontrôlable des partis politiques au Sénégal. Le parti de Macky Sall porte, aujourd’hui, à 145 le nombre de partis existants au Sénégal. Une situation qui rend flou la lecture du jeu politique sénégalais. Car les alliances se font et se défont, non pas sur la base du positionnement des partis sur l’échiquier politique national, mais plutôt sur des alliances circonstancielles. Le caractère circonstanciel des alliances politiques au Sénégal fait qu’elles portent en elles-mêmes les germes de leur implosion. Les exemples du «Ca 2000», de Jamm Jii et du Front Siggil Senegaal en disent long.
Par ailleurs, des hommes politiques créent des partis non pas pour conquérir le pouvoir mais pour constituer un groupe de pression dans le seul et unique but de peser lourd sur le «marché politique» ou, tout simplement, de rallier le pouvoir. Nul besoin de chercher loin pour étayer notre propos, combien sont-ils ces leaders politiques qui, hier, étaient les tenants des discours les plus incendiaires contre le Président Abdoulaye Wade et, aujourd’hui, ses plus grands défenseurs.
A noter que cette pléthore de partis politiques n’est pas l’apanage du Sénégal, mais c’est un constat qui se fait dans presque tous les pays d’Afrique francophone. En effet, nous avons 113 partis politiques au Mali, 115 partis au Bénin, 130 partis en Côte d’Ivoire, 300 partis en République démocratique du Congo etc. Cette situation contraste avec le nombre de partis politiques que l’on retrouve dans les pays d’Afrique anglophone. Par exemple, le Nigeria malgré ses plus de 115 millions d’habitants compte moins de 20 partis politiques.
Ce nombre pléthorique de partis politiques dans les pays d’Afrique francophone porte entorse à leur démocratie. «Trop de politique, nous disait un penseur, est la malédiction de l’Afrique.» A y voir de plus prés, la divergence des hommes politiques africains notamment sénégalais, réside moins dans leur idéologie que dans la gestion des carrières personnelles. Chacun veut être au devant de la scène et nul ne veut être en reste. Ce phénomène a le mérite de susciter des réflexions au niveau des chercheurs sur la limitation ou la rationalisation des partis politiques. Tout ceci pour nous demander si le Président Senghor n’avait pas raison en limitant le multipartisme au nombre des idéologies. Car le pluralisme politique est nécessaire en démocratie, mais son usage abusif est susceptible de tuer la démocratie, car il conduit à l’anarchie.

Source : Le Quotidien

Adama SADIO ADO - Sociologue et étudiant en Science politique à l’Ucad Président du Collectif des
jeunes cadres de Guédiawaye Coordonnateur de la Jeunesse Ondh / adosadio@yahoo.fr

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