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Sécurité routière : A Saint-Louis aussi, les mesures annoncées divisent les acteurs

La batterie de mesures prises parle gouvernement pour renforcer la sécurité sur les routes du Sénégal, est diversement appréciée par les différents acteurs de la capitale du Nord. A la gare routière de la vieille ville, la question divise les chauffeurs. Si les uns approuvent les mesures, d'autres appellent les autorités étatiques à y aller avec prudence.


Rédigé par leral.net le Vendredi 13 Janvier 2023 à 10:45 | | 0 commentaire(s)|

L es 22 mesures de sécurité routière annoncées par le Premier ministre, Amadou Bâ, n'ont pas laissé indifférent les acteurs du transport de Saint-Louis. A la gare routière municipale, elles sont au centre de toutes les discussions et les commentaires vont bon train. Et chacun y va de ses propres interprétations.

Trouvé confortablement assis au volant de son minicar, El hadj Abdoul Aziz Sèye, un chauffeur d'une soixantaine d’années, salue la majeure partie des décisions arrêtées par le gouvernement.

« Les chauffeurs et les transporteurs ne sont pas des Sénégalais à part. Ils doivent se conformer aux lois et règlements du pays. Toute mesure qui renforce la sécurité routière, doit être appliquée et respectée par tous les acteurs. Car, la vie d'une personne n'a pas de prix. C'est pourquoi, j'adhère à 100% aux décisions prises lors du Conseil interministériel sur la sécurité routière », dit-il.

Avant de laisser entendre que si les mesures annoncées et celles du code de la route sont strictement respectées par les chauffeurs, des centaines de vies humaines peuvent être sauvées et peut-être qu’il n'y aurait pas eu la tragédie de Kaffrine.

« La volonté divine existe, mais toujours, il y a la main de l'homme dernière. Dans la plupart des accidents enregistrés sur nos routes, la défaillance humaine est manifeste. Chaque véhicule de transport a un nombre de passagers et un poids de bagages limité qu’il doit supporter. Pourtant, tous les chauffeurs le savent, mais pour des raisons d'argent et de profit, on fait fi des règles et s'expose aux dangers de la route. Les transporteurs modifient les bus, en ajoutant les places assises. On met des tonnes de bagages sur les toits des véhicules et ils font d’autres infractions qui, quotidiennement, mettent en danger la vie des passagers. Je crois que les mesures sont salutaires pour le secteur », ajoute Aziz Sèye.

Toutefois, le vieux chauffeur lance un appel au gouvernement, pour que le renouvellement du parc automobile soit accéléré et accessible à tous les acteurs.

‘’ Un Etat sérieux ne gère pas ses affaires dans l'émotion‘’

Si certains chauffeurs magnifient les mesures et plaident pour leur application, d’autres invitent par contre le gouvernement, à revoir sa copie et à s'asseoir autour d'une table avec tous les acteurs, avant leur mise en œuvre. Pour le secrétaire général du Regroupement des chauffeurs de Saint-Louis, Ibrahima Diakité, avant toute application de décision les concernant, il faut d'abord poser des préalables.

« La charrue a été mise avant les bœufs. Les mesures ont été prises par le gouvernement dans l'émotion et l'État veut les appliquer à la va-vite. Raison pour laquelle nous invitons le gouvernement à s'ouvrir aux autres acteurs, plus particulièrement aux chauffeurs, pour de larges concertations. Sinon, on risque d'aller à un bras de fer dans l'application. C'est impossible de faire appliquer certaines mesures dans le secteur du transport, sans y associer les véritables acteurs », déclare-t-il.

Poussant le bouchon plus loin, il soutient que, pour des raisons politiques, le gouvernement veut faire porter le chapeau des accidents uniquement aux chauffeurs.

« A suivre de près la liste des mesures de sécurité routière annoncées, on dirait que les accidents n’incombent qu’aux chauffeurs et aux transporteurs. Ce qui est totalement faux. L'Etat en a une grande part de responsabilité, qu'il refuse malheureusement d'assumer. Les routes trop étroites et non éclairées la nuit dans certaines zones, le vieillissement du parc automobile du transport en commun, en sont une parfaite illustration. Pourtant, en sortant la liste des mesures, le gouvernement n'a pipé mot là-dessus », martèle M. Diakité.

A ses yeux, sur la longue liste des 22 mesures de renforcement de la sécurité routière, bon nombre d'entre elles ne s'imposent pas et vont créer beaucoup de dégâts collatéraux dans le secteur.

« Si on supprime les porte-bagages dans l'immédiat, comment vont faire les voyageurs avec leurs bagages, alors qu'aucun dispositif logistique public ou privé n'est encore pris, pour prendre en charge cette question ? La décision interdisant le voyage du transport interurbain nocturne est inopportune. Car, les mêmes causes produisent les mêmes effets, parce que tous les véhicules décolleront à la même heure et il y aura une densité très forte sur les routes et bonjour, les risques d'accidents.

C'est ce qu'on peut noter dans le secteur de la vente des pneus d’occasion. Les pneus neufs coûtent cher et sont souvent de très mauvaise qualité. C'est pourquoi, les chauffeurs privilégient les pneus venant d'Europe. Maintenant, ceux qui ont déjà investi dans ce créneau, ils feront quoi avec leurs stocks ?

Voilà des raisons suffisantes qui doivent inciter le gouvernement à s'asseoir avec tous les acteurs, au lieu de faire du forcing. Puisqu’un Etat sérieux ne gère pas ses affaires dans l'émotion. Même si nous sommes ouverts au dialogue et à la concertation, le secteur du transport ne se laissera pas faire », prévient Ibrahima Diakité.

Toutefois, le secrétaire général du regroupement des chauffeurs de Saint-Louis apprécie la mesure de formation des différents acteurs et leur capacitation concernant la prévention et la sécurité routière.





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