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A côté du français, la langue wolof devrait être la seconde langue officielle du Diolof-Sénégal*

Avec la récente polémique entre Me El Hadj Diouf et Serigne Mboup, Maire de Kaolack, sur la nécessité d’un candidat à la Présidentielle, de pouvoir parler et écrire couramment la langue officielle française, se pose la place de la langue Wolof dans l’état du Sénégal.
Les candidats lors de cette campagne présidentielle, devront se prononcer sur la nécessité de faire du Wolof, la langue officielle.


Rédigé par leral.net le Mercredi 13 Mars 2024 à 15:46 | | 0 commentaire(s)|

En 1960, lors de l’accession de notre pays, le Diolof, le Président Senghor et les élites occidentalisées voulaient faire du français, la seule langue officielle, et accessoirement, devenir le véhiculaire de l'intégration nationale.

Tenue à l’écart par l’état senghorien, la langue ouolof s'est progressivement imposée comme la lingua franca parlée plus de 96 % de la population, langue de l'unification nationale.

Ce n’est pas l’origine exogène et coloniale du français qui a été un élément déterminant dans son échec à jouer ce rôle, car on sait que plusieurs pays anciennement colonisés d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique Latine, se sont réappropriés la langue importée ( espagnol,anglais portugais français), qui a réussi à se banaliser, certes parfois en se créolisant.

Par exemple, en Côte d’Ivoire, le français créolisé est la lingua franca.

Par contre au Diolof-Sénégal, on peut citer les trois raisons principales qui expliquent pourquoi la langue de Koch Barma l'a emporté sur la langue officielle, celle de Molière, dans l'appel d'offre identitaire de notre nation postcoloniale en construction.

1. Première raison

Le refus de l'Etat d'officialiser la langue majoritaire le Wolof, a permis la dépolitisation des enjeux linguistiques.

C'est parce que la wolofisation a été un phénomène rampant, ordinaire, par le bas, non pris en charge en haut par l'Etat, qu'elle a pu se réaliser sans qu'une opposition de la part des membres des communautés sénégalaise non-wolof, ne puisse aisément se politiser contre un phénomène perçu comme « naturel » ou « spontané » et non volontairement hégémonique .

Prospérant à l'abri du français officiel, sans imposition et sans que personne ne l'ait réellement voulu, sans plan directeur ni acteur politique identifiable auquel imputer le phénomène, la langue wolof est devenu co-extensive avec la nation sénégalaise

2. Deuxième raison

Des enquêtes sociolinguistiques ont bien montré le clivage existant dans les représentations populaires entre le français, perçu comme la langue de l'officialité , de la distinction sociale, du formel, de la rigidité de la norme, de la hiérarchie et de la verticalité et la langue de Kocth Barma, le wolof, vécue comme celle de la sociabilité horizontale, de la communication spontanée, de l'informalité, de la souplesse linguistique et identitaire.

Le prestige social et culturel du français, a aussi été son handicap, le rendant incompatible avec la sphère du quotidien et l'excluant des situations de convivialité.

En wolof, on n'a pas peur de faire des fautes, personne ne te corrige .

Cette remarque sur l'attrait du wolof urbain, langue orale avant tout, dit aussi en creux, les inconvénients du français, langue écrite et officielle.

La maîtrise du wolof est ainsi devenue « garante de l'intégration urbaine, perçue à la fois comme plus « moderne » que les autres langues sénégalaises, et plus souple que le français officiel.

3. Trosième raison

Le français, langue de l'Etat, de sa modernité et de son prestige, a lié son destin à celui-ci. Or, comme l'a montré Donal Cruise O'Brien, la crise de l'Etat et son retrait relatif dans les années 1980, entre ajustement structurel, réduction des effectifs de fonctionnaires et informalisation de l'économie, a entamé l'attrait du modèle culturel francophone, dont la maîtrise ne constituait plus une assurance d'accès à l'emploi public, ni au prestige social .

Le wolof se dote dès lors d'un atout supplémentaire face à la réduction des débouchés dans la fonction publique : l'insertion dans les réseaux de la survie économique

L'élitisme francophone de l'Etat senghorien apparaissait trop déconnecté des désirs culturels et des réalités quotidiennes de la « débrouille » de la jeunesse urbaine des années 1980-2020.

D'autres « figures de la réussite » émergent pour les nouvelles générations, entre l'informalité du marché, le salut dans la religiosité et l'espoir de l'émigration, dont le wolof urbain constitue désormais le vecteur d'identification.

L'ethos du fonctionnaire lettré francophone est sérieusement concurrencé par celui du moodu-moodu (petit commerçant analphabète en français), porteur d'un modèle culturel pétri de valeurs wolof.

Avec la crise de l'Etat, c'est le modèle culturel d'une certaine élite francophone qui n'a pu s'étendre par mimétisme aux autres groupes sociaux? quand le modèle islamo-Wolof l’a réussi.





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