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De Kaolack à Al‑Azhar : l’itinéraire d’un érudit sénégalais devenu Shaykh al‑Islām

Rédigé par leral.net le Mercredi 3 Septembre 2025 à 12:02 | | 0 commentaire(s)|

Une trajectoire singulière au cœur de la confrérie Tijaniyya Né le 8 novembre 1900 à Taïba Niassène, entre Kaolack et la Gambie, Ibrahim Niasse est issu d’une lignée religieuse notable : son père, Abdoulaye Niasse (1840–1922), était une référence de l’ordre Tijani en Saloum. Éduqué dans cette tradition, il s’installe à Kaolack où il enseigne […]

Une trajectoire singulière au cœur de la confrérie Tijaniyya

Né le 8 novembre 1900 à Taïba Niassène, entre Kaolack et la Gambie, Ibrahim Niasse est issu d’une lignée religieuse notable : son père, Abdoulaye Niasse (1840–1922), était une référence de l’ordre Tijani en Saloum. Éduqué dans cette tradition, il s’installe à Kaolack où il enseigne le Coran dans les écoles coraniques du père après sa disparition en 1922.

En 1930, il se proclame héritier spirituel du fondateur de la Tijaniyya, Ahmed Tijani, et inaugure une nouvelle forme de spiritualité basée sur la tarbiyya — une initiation mystique vers la connaissance intuitive (maarifa) — qui le distingue nettement des autres branches du mouvement. Ses premiers écrits, Rûh al‑adab (vers 21 ans) et Kâshif al‑ilbas (1930), témoignent de son érudition dense et précoce.

Une influence régionale puis mondiale

La diffusion de son message connaît une transformation décisive en 1937, lors d’un pèlerinage à La Mecque, où il est invité à Kano (Nigéria) par l’émir Abdoulahi Bayero. Ce dernier adhère à la branche Ibrahimiyyah, en faisant un allié stratégique pour l’expansion du mouvement en Afrique de l’Ouest après la Seconde Guerre mondiale.

À la fin des années 1960, sa communauté totalaise plusieurs millions de membres présents dans une étendue géographique vaste : nord du Nigéria, Ghana, Niger, Togo, Libéria, Sierra Leone, Tchad, Cameroun, Gambie, Mauritanie et la région du Sine Saloum. Aujourd’hui, son influence perdure jusque dans les diasporas aux États‑Unis, en Asie et au Moyen‑Orient.

Un érudit engagé sur les scènes religieuses internationales

Reconnu dans le monde islamique, Cheikh Ibrahim Niasse participe à de grandes instances internationales. Il devient notamment vice-président de la Ligue islamique mondiale et membre de plusieurs conseils savants, dont ceux de l’Université d’Al‑Azhar et de l’Académie de Recherche islamique du Caire.

Sa renommée est confiée par son titre honorifique « Shaykh al‑Islām », attribué après avoir dirigé la prière du vendredi à la mosquée Al‑Azhar, faisant de lui le premier Africain noir à occuper cette fonction symbolique.

Un homme de dialogue, porteur de réforme et d’égalité

Cheikh Ibrahim Niasse ne se limite pas à un rôle spirituel. Il s’implique dans les mouvements de libération de l’Afrique, nouant des liens avec Kwame Nkrumah (Ghana), Gamal Abdel Nasser (Égypte), Sékou Touré (Guinée), ou encore le roi Fayçal d’Arabie saoudite.

Il prône une éducation inclusive et progressiste : ses filles ont étudié et mémorisé le Coran aux côtés des garçons, et il affirme que, en matière de savoir religieux, les femmes peuvent rivaliser avec les hommes. Sur le plan spirituel, il encourage la formation d’un islam ouvert, tolérant et engagé dans les luttes sociales.



Source : https://xalimasn.com/2025/09/03/de-kaolack-a-al%e2...