Par Oumar NDIAYE Qu’ont les États bâtis sur d’anciennes civilisations à vouloir réinventer leur histoire, leur gloire d’antan et ainsi montrer leurs grandeur et splendeur au fil du temps ? Que ce soit la Chine, la Turquie, la Russie ou l’Égypte, chacun de ses pays fait recours à son histoire pour mener ses affaires et […]
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Par Oumar NDIAYE
Qu’ont les États bâtis sur d’anciennes civilisations à vouloir réinventer leur histoire, leur gloire d’antan et ainsi montrer leurs grandeur et splendeur au fil du temps ? Que ce soit la Chine, la Turquie, la Russie ou l’Égypte, chacun de ses pays fait recours à son histoire pour mener ses affaires et en faire aussi le moteur de sa projection de puissance.
L’Égypte, pays des pharaons à la civilisation ancienne et antique, vient d’organiser une grande parade des momies royales de l’époque pharaonique pour montrer une façade glorieuse de son passé sur lequel elle veut se baser pour retrouver grandeur et splendeur. Au-delà de son passé, l’Égypte compte sur son ancrage arabe et son enracinement africain pour entrevoir sa volonté de puissance portée par son chef d’État, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi. La dimension nationaliste est ainsi un levier que ce pays compte utiliser comme outil d’exaltation et de stimulation pour montrer que la grandeur de l’Égypte n’est pas seulement géographique et démographique. La récente référence à l’Égypte pharaonique avec la parade des momies royales est conforme à la volonté du maréchal Abdel Fattah al-Sissi de faire revenir son pays au premier plan dans les différentes aires géographiques à laquelle elle appartient : le monde arabe et l’Afrique. L’ancrage arabe et islamique de l’Égypte se voit dans la place qu’elle occupe dans le monde arabe, et qui se traduit par la célèbre boutade disant que «les livres sont écrits au Caire, imprimés à Beyrouth et lus à Bagdad». Ce n’est pas pour rien que ce pays abrite l’université Al Azhar considérée comme un centre de diffusion et de réflexion de la pensée de l’islam sunnite.
Longtemps reléguée au second plan, la dimension africaine de l’Égypte est revenue au-devant de la scène ces trois dernières années. La présidence de l’Union africaine d’Abdel Fattah al-Sissi entre 2019 et 2020 a permis à son pays de se reconnecter politiquement à l’Afrique. Aussi, il y a eu l’accueil, en 2019, de la Coupe d’Afrique des nations 2019, à la suite du retrait de l’organisation de la compétition au Cameroun. Autant d’événements qui signent l’avènement d’un renouveau dans la manière de voir l’Afrique par l’Égypte.
Depuis son accession au pouvoir en 2013, Al-Sissi a entrepris de restaurer la politique africaine de l’Égypte, car le fossé entre son pays et le reste de du continent était grand. Alors que Le Caire était davantage tourné vers le monde arabe et l’Occident depuis la présidence d’Anouar El-Sadate (1970-1981), il a renoué avec «une diplomatie des sommets», boudée par l’ancien président Hosni Moubarak (1981-2011), après une tentative d’assassinat contre sa personne à Addis-Abeba en 1995. Les bouleversements intervenus dans le pays et la région, dès 2011, ont rendu ce recentrage inévitable.
TERRE-MER. Au centre des enjeux actuels et futurs de l’eau, l’Égypte pourrait faire aussi les frais des tensions suscités autour de la gestion du liquide précieux, présenté comme un casus belli dans ce nouveau monde. Entourée par la Mer Méditerranée et la Mer Rouge, l’Égypte est ainsi au centre des dynamiques conflictuelles qui se déroulent dans ces Eaux. Devenue un lieu de projection, de puissance et aussi de conflits, la Méditerranée fait l’objet de plusieurs convoitises de la part de la Turquie et des autres États riverains. L’Égypte ne pourrait pas rester indifférente face à ce qui s’y passe, surtout avec son pays frontalier qui traverse depuis presque dix ans une crise sans fin et qui pourrait l’affecter. Le récent incident sur le Canal de Suez montre l’importance des Mers qui entourent l’Égypte. Au-delà de toutes les agitations maritimes, dont les marées pourraient baisser la température dans les relations entre l’Égypte et les autres pays, il y a aussi le conflit sur le Nil qui, aujourd’hui, occupe une place déterminante dans les relations entre l’Égypte et ses voisins au sud, le Soudan et l’Éthiopie. L’échec des négociations sous l’égide de l’Union africaine sur le dossier du Grand barrage éthiopien de la Renaissance (Gerd) sur le Nil est là pour rappeler que l’Égypte risque de voguer sur un long fleuve qui ne sera pas tranquille dans sa quête de grandeur et de splendeur d’avant et d’antan…
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