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L’ENA ANNULE L’ADMISSION DE DEUX CANDIDATS AU CONCOURS PROFESSIONNEL CYCLE A : Pape Diop et Alioune Touré Seck crient au «scandale», le Directeur de l’ENA explique

Rédigé par leral.net le Mardi 24 Avril 2012 à 22:02 | | 0 commentaire(s)|

L’Ecole nationale d’administration (Ena) est secouée par une affaire de «fraude» au Concours professionnel d’entrée à l’Ena, cycle A. Les candidats Pape Diop et Alioune Touré Seck accusent l’Administration de l’école d’avoir annulé leur admission à la suite d’un recours déposé par un candidat qui avait intérêt à agir et ayant apporté la preuve que ces derniers ne remplissaient pas les conditions prévues par les textes pour postuler à ce concours.


L’ENA ANNULE L’ADMISSION DE DEUX CANDIDATS AU CONCOURS PROFESSIONNEL CYCLE A : Pape Diop et Alioune Touré Seck crient au «scandale», le Directeur de l’ENA explique
Les sieurs Pape Diop, secrétaire d’administration, adjoint au préfet de Saint-Louis, et Alioune Touré Seck, Chancelier des Affaires étrangères, Premier Secrétaire au Consulat général du Sénégal à Paris, n’en reviennent toujours pas. Ces derniers avaient été déclarés admis au concours professionnel d’entrée à l’Ecole nationale d’administration, session 2011. Mais leur joie n’a été que de courte durée. Puisque, après la publication des résultats par le jury et avant l’arrêté du Premier ministre confirmant lesdits résultats, un autre candidat sur la liste, a déposé un recours en bonne et due forme sur la table du directeur de l’Ena pour demander l’annulation de l’admission des sieurs Diop et Seck, pour la bonne et simple raison que ces derniers ne remplissaient pas les conditions pour postuler à ce concours.

Les sieurs Diop et Seck déclarent avoir déposé leur dossier de candidature dans les délais. Ces dossiers étaient composés «d’une photo d’identité, une demande manuscrite adressée au Directeur général de l’Ena, l’acte de nomination dans le corps d’appartenance, une photocopie légalisée de la carte nationale d’identité, une quittance de paiement des frais d’inscription, un curriculum vitæ actualisé, daté et signé, une enveloppe timbrée portant l’adresse exacte du candidat, un certificat administratif signé par l’autorité investie du pouvoir de gestion du candidat, mentionnant la matricule, la hiérarchie, le grade et l’ancienneté», listent-ils. Par la suite, poursuivent-ils, le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye a sorti un arrêté pour fixer la liste des candidats autorisés à faire le concours, parmi lesquels les sieurs Seck et Diop ainsi que plusieurs autres candidats de la même promotion de 2003/2005 au cycle B de l’Ena que ces derniers. Une convocation a été envoyée à chaque candidat, pour le démarrage des 4 épreuves d’admission (Droit Public, Economie ou Gestion publique, Culture générale et une matière de spécialisation) les 29 et 30 décembre 2011. Ils se sont présentés aux différentes phases du concours et ont été déclarés admissibles après les épreuves d’admissibilité ensuite déclarés définitivement admis le 1er février 2012, après les épreuves d’admission, en l’occurrence la note de synthèse et l’entretien, par un jury composé de 26 personnes et nommé par arrêté du Premier ministre N° 12958/PM/ENA du 23 novembre 2011, modifié. A la suite de leur admission : «Le Directeur dénéral de l’Ena fourni aux sieurs Diop et Seck des certificats d’inscription datés du 15 février 2012. Leur joie incommensurable n’a été que de courte durée. Le vendredi 09 mars 2012. Coup de théâtre. Le Directeur général de l’Ena, M. Mamadou Tall, convoque les sieurs Aly Ndiaye, Adama Diallo et Pape Massaër Diop, Aliou Touré Seck n’étant pas encore revenu de son poste de Paris, les seuls candidats de la promotion 2003/2005 ayant réussi au concours, pour les informer d’un recours qui a été formulé par un candidat en liste d’attente qui conteste la régularité de leurs candidatures. Ce dernier soutient dans sa requête adressée au directeur de l’Ena que les candidats sus nommés n’avaient pas totalisé 5 années effectives après leur titularisation. Condition sine qua non pour la validité de toute candidature à ce concours professionnel. Alors le directeur de l’Ena, en bon administratif, s’est saisi de la question. Ainsi, le 13 mars 2012, il a adressé une lettre datée du 09 févier 2012 aux sieurs Diop et Seck pour leur notifier l’invalidation de leurs candidatures et leur remplacement par les suivants respectifs sur la liste d’attente des admis de la section Administration générale et sur la liste d’attente de la section Diplomatie. Dès réception desdites lettres, précisent les sieurs Diop et Seck, des réponses ont été adressées au Directeur général de l’Ena le 20 mars 2012 pour lui demander de retirer cette décision de notification d’invalidité avec ampliation au Premier ministre, au ministre des Affaires étrangères et au ministre de l’Intérieur. Après quoi, ils ont saisi également le Médiateur de la République la même date. Le 22 mars 2012, l’arrêté du Premier ministre N°002418PM/ENA du 08 mars 2012, fixant la liste des candidats admis à la session 2011 des concours directs et professionnels d’entrée au cycle A de l’Ecole nationale d’administration (Ena) est affiché à l’Ena mais, constatent-ils, ledit arrêté n’est pas «publié dans le site Internet de l’école comme à l’accoutumée». Pis, dénoncent-ils : «Cet arrêté n’a pas pris en compte les sieurs Diop, 4e de la section Administration générale, et Seck, 1er de la section Diplomatie, qui ont été déclarés définitivement admis au 1er février 2012 par la délibération du jury».



«Le Directeur de l’Ena est incompétent pour invalider des candidatures»

Très amers après cette décision, les sieurs Diop et Seck ruent dans les brancards. Ils crient à l’incompétence du directeur de l’Ena pour connaître de cette affaire : «Le directeur de l’Ena n’est pas compétent pour invalider des candidatures déjà déclarées définitivement admises. C’est une commission instituée par arrêté du Premier ministre qui a effectué le contrôle des candidatures et c’est le Premier ministre lui-même qui a publié par arrêté la liste des candidats habilités à concourir. Alors que le directeur de l’Ena, en envoyant une lettre de notification d’invalidité des candidatures des sieurs Diop et Seck, a violé le principe du parallélisme des formes», dénoncent-ils. Poursuivant dans leur réquisitoire contre l’acte d’invalidation de leur admission, les sieurs Diop et Seck relèvent que l’arrêté était «irrégulier» pour défaut de visa : «Aucune modification des résultats de la délibération du jury et aucun visa portant sur une décision du Premier ministre modifiant la délibération du jury», contestent-ils. Autre irrégularité notée par les plaignants, l’existence de deux arrêtés datés et signés le même jour par le Premier ministre et ayant le même numéro d’enregistrement, mais dont les contenus sont différents. A en croire ces candidats malheureux, «l’arrêté N 002418PM/ENA du 08 mars 2012, fixant la liste des candidats admis à la session 2011 des concours directs et professionnels d’entrée au cycle A de l’Ecole nationale d’administration (Ena) affichée à l’Ena est différent de celui classé par le service de la législation de la Primature, en ce sens que l’arrêté affiché par l’Ena exclut les sieurs Diop et Seck, alors que l’arrêté enregistré à la Primature exclut aussi bien les sieurs Diop et Seck que les sieurs Aly Ndiaye admis à la section Diplomatie et Adama Diallo admis à la section Administration générale».



«La validité des candidatures est contrôlée est à priori»

Les sieurs Diop et Seck qui ne décolèrent pas parlent de violation du droit acquis. En ce sens que, disent-ils : «Le contrôle de la validité des candidatures est un contrôle à priori qui a été effectué par la commission des candidatures à la suite duquel le Premier ministre a pris un arrêté pour établir la liste des candidats autorisés à concourir». Et que c’est seulement après la publication de cette liste et après réception des convocations que les sieurs Diop et Seck ont déposé des congés pour faire le concours. Le Directeur général de l’Ena ne peut pas, après leur admission, revenir sur le contrôle qui aurait été effectué avec défaillance par l’Administration pour invalider des candidatures déjà admises et, par ricochet, invalider leur admission au concours. En le faisant, soutiennent-ils : «Le Directeur général de l’Ena a violé le droit acquis des sieurs Diop et Seck par l’effet, d’une part, de l’arrêté publiant la liste des candidats et, d’autre part, par la délibération du jury les ayant déclarés définitivement admis.» Ils invoquent aussi, une violation du droit de la défense. Car «aucun recours ni aucun reproche n’a été notifié aux sieurs Diop et Seck aussi bien par le Directeur général de l’Ena avant ses lettres de notification d’invalidité de leurs candidatures et leur remplacement, que par le Premier ministre avant la prise de son arrêté qui exclut les sieurs Diop et Seck de la liste des candidats admis», estiment-ils.

MAMADOU TALL, DIRECTEUR GENERAL DE L’ENA : «Nous avons rétabli en déclarant les dossiers des sieurs Diop et Seck comme non conformes»

Que répondez-vous aux candidats Pape Diop et Aliou Touré Seck qui accusent l’Ena d’avoir invalidité leur admission au concours professionnel d’entrée à l’Ena au cycle A, cela après un recours introduit par un autre candidat ?

Je confirme effectivement que les sieurs Diop et Seck ont été des candidats au concours d’entrée d’administration au cycle A professionnel. Ils ont été admis par les jurys. Et un candidat qui a intérêt à agir après la publication des résultats a introduit un recours gracieux auprès de l’autorité compétente. Le recours gracieux comportait un certain nombre de documents sur la base desquels il fonde son argumentaire pour demander qu’il y ait réparation par rapport à M. Diop. Quand nous avons reçu le dossier, comme le veut la réglementation, nous l’avons instruit. En instruisant, nous sommes remontés au dossier individuel des candidats et nous nous sommes aperçus que les dispositions n’ont pas été respectées. C’est eu égard à ces dispositions-là, notamment l’article relatif à la titularisation des cinq années. Malheureusement, ces candidats-là n’ont pas pu avoir les cinq années demandées pour postuler. C’est pour cela que nous avons pu rétablir le droit au requérant et déclarer les dossiers des sieurs Diop et Seck comme étant non conformes. Par conséquent, leur admission ne peut plus être valable. Nous avons suivi la liste d’attente comme cela est prévu par la réglementation.

Pourquoi la commission chargée de statuer sur les candidatures n’a pas pris la peine de bien vérifier les dossiers des candidats avant le concours ?

C’est une très bonne question. Mais il faut dire que le nombre de candidats était très élevé. Il y avait 18 000 candidats à concourir. Ensuite, il est de rigueur dans de pareilles situations au niveau de cet établissement que même les examens se déroulant après la proclamation des résultats, le Directeur général a la possibilité de regarder les dossiers des admis pour voir si ce sont des dossiers conformes. Cela, nous le faisons systématiquement. Même s’il n’y avait pas de requêtes, c’était une obligation pour moi de regarder les dossiers des candidats qui sont déclarés admis pour pouvoir vérifier leur conformité aux dispositions réglementaires. Maintenant, il s’y ajoute qu’il y a eu un candidat, qui a intérêt à agir, qui a introduit un recours gracieux, nous avons été obligés de regarder ces dossiers-là. Eux également, en déposant leurs dossiers, ils se sont trompés peut-être de bonne foi, comme ceux qui recevaient les dossiers certainement. Ils pensaient qu’ils remplissaient les conditions. Mais en tout état de cause cela n’exclut pas que, quand un recours est fondé, l’Administration étant neutre et impersonnelle doit pouvoir rétablir les déséquilibres juridiques.

Mais quand un jury composé d’éminentes personnalités déclarent des candidats admis, est-ce que l’Administration a le droit ou la capacité de revenir sur cette décision du jury ?

Le jury ne déclare pas définitivement admis. La procédure est qu’un jury se réunit et déclare admissibles des candidats sur la liste. Il se réunit sur la base de notes obtenues. Le jury ne regarde pas les dossiers individuels des candidats. Il se base sur des notes obtenues par rapport aux dispositions réglementaires. Il publie les résultats. La publication des résultats ne vaut pas admission définitive. L’admission définitive est consacrée par un acte. C’est par un arrêté qui fixe la liste définitive des admis au concours de l’Ena. C’est avant la publication de cet acte que le candidat qui avait intérêt à agir a fait son recours gracieux. L’Administration, se fondant sur ces dispositions réglementaires, ne remet pas en cause les délibérations du jury, mais nous rétablissions un équilibre. C’est pourquoi d’ailleurs le jury prévoit une liste d’attente pour pouvoir, s’il y a éventuellement des défaillances ou des erreurs, corriger et puiser sur la liste d’attente.


Harouna FALL
Source L'Observateur